Psychosomatique: le corps, sentinelle de l’âme
Quand les soucis prennent le dessus, le psychisme n’est pas le seul à souffrir, notre corps aussi. Commence alors une recherche difficile de la cause. Le plus important d’abord: n’allez pas penser que les affections psychosomatiques sont des maladies imaginaires.
Une pression constante au travail. Un stress persistant dans la vie privée. Soucis et angoisses Et soudain, notre corps aussi nous lâche. L’être humain est complexe. C’est particulièrement flagrant dans le domaine de la psychosomatique. Dans cette discipline, le corps et le psychisme ne font qu’un. L’utilité de cette approche pour dénouer la toile des interactions est démontrée par deux réalités: jusqu’à 80% des individus expérimentent au moins une fois dans leur vie que le stress psychologique peut avoir des effets sur la santé physique. Palpitations, sauts de tension artérielle, mal de dos, eczéma... Autant d’appels au secours que nous envoie notre corps. Pourtant, quand on consulte le médecin: tout va bien côté cœur, les disques intervertébraux sont bien en place, les tests d’allergie sont normaux. Que se passe-t-il?
«L’être humain peut surmonter physiquement et mentalement des stress limités dans le temps, mais pas les stress qui durent», explique Ulrich Egle, professeur de médecine psychosomatique et de psychothérapie au Sanatorium de Kilchberg. Si le stress persiste dans la durée, le cortisol, hormone du stress, s’accumule durablement dans le sang. «Elle entraîne une altération de certaines zones du cerveau», explique Ulrich Egle, et notamment les zones responsables de la gestion du stress. Cela perturbe l’autorégulation de l’organisme, qui assure normalement le relâchement après les pics de stress dans le corps. Conséquence: on tombe malade.
Les personnes qui ont tendance à être perfectionnistes et à se surmener sont plus sensibles à ce phénomène. Ainsi que celles qui ont peur de la nouveauté ou qui ont du mal à supporter l’incertitude. Pour Ulrich Egle, ce qui est décisif, c’est la façon dont une personne gère le stress et évalue les situations difficiles. «Notre capacité d’adaptation est forgée par tout ce que nous avons appris ainsi que nos expériences. Ce ressort nous permettra de rebondir en cas de nouvelles situations et de faire face aux défis.» Un modèle comportemental qui peut être efficace pendant un moment, mais conduire à un trouble du stress à long terme. Dans l’idéal, le cerveau devrait pouvoir gérer les situations stressantes avec la plus faible dépense d’énergie possible.
Axer la psychothérapie sur les causes: la voie royale
Quand les besoins en énergie sont trop importants pour faire face, les personnes concernées doivent demander de l’aide. La première étape consiste à prendre conscience de la maladie. «Les personnes souffrant de maladies psychosomatiques préfèrent souvent être réellement, c’est-à-dire physiquement malades, plutôt que de reconnaître qu’elles souffrent d’une maladie due au stress», explique Ulrich Egle. Même si le diagnostic est sans appel, il faut souvent effectuer un véritable travail de persuasion pour que ces patients acceptent de se soigner. «Sans leur coopération active, la thérapie ne peut pas aboutir».
Pour Ulrich Egle, les médicaments ne sont utiles contre les maladies liées au stress qu’en cas de crise aiguë. Il est très sceptique sur l’utilisation généralisée et sur de longues périodes de tranquillisants ou d’opiacés. «Il n’est pas rare que ces médicaments entraînent des troubles addictifs supplémentaires.» Selon lui, le traitement devrait plutôt s’articuler autour d’une psychothérapie recherchant les causes. «Les patients doivent comprendre les mécanismes à l’origine de leurs maux pour pouvoir changer leur modèle de comportement», explique Ulrich Egle. Ce «réapprentissage» sera ensuite mis en œuvre par des exercices concrets dans la vie quotidienne et complété par des techniques de relaxation et un entraînement sportif adapté. «Cela permet souvent de corriger efficacement les dysfonctionnements du système nerveux végétatif et du système immunitaire.» Pour que les personnes concernées repartent sur un nouveau pied.
Conseil d’expert
Ulrich T. Egle, Professeur de médecine psychosomatique et de psychothérapie
«Pour changer un modèle comportemental, un patient peut se concentrer sur des tâches très différentes. Mieux être à l’écoute de ses émotions et besoins, par exemple, se faire du bien, etc. Cela passe souvent par une communication plus ouverte de ses intérêts ou un lâcher-prise dans la quête de la perfection. Et en apprenant à être plus tolérant face aux incertitudes.»